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Héros malgré lui, Philippe Hiquily entre dans la vie en empruntant une route de laquelle il va souvent être tenté de dévier sous les assauts d’un destin inconstant. Ses entreprises contraires qui semblent l’écarter du but initial ne le sont qu’en apparence et le font avancer dans une seule direction. Son parcours révèle une unité dont son œuvre témoigne. L’esprit en éveil, animé d’interrogations inquiètes, il fait preuve d’une indépendance qui le tient à distance des groupes. Jamais totalement d’accord avec les surréalistes, ni avec les abstraits, il exploite une veine esthétique dont l’enchantement ne se tarira jamais.

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Philippe Hiquily est né à Montmartre en 1925. Après des études secondaires au lycée Victor Duruy, il s'engage à 18 ans dans la Résistance aux côtés de son père. La guerre finie, il entre brièvement aux Beaux-arts d'Orléans avant de rejoindre la division Leclerc et partir pour l'Indochine où il passera deux années de 1945 à 1947. A son retour, il s'inscrit à l'Ecole des Beaux-arts à Paris et se forme à la sculpture dans les ateliers de Janniot et de Gimond où il se lie avec César, Albert Féraud, Michel Guino. Tous vont élire le métal, après avoir acquis les bases indispensables du métier, maîtrisé les étapes du modelage et de l'étude d'après modèle vivant, travaillé le plâtre, la terre et la céramique pour discipliner la main. Hiquily quittera les Beaux-arts en 1953 avec le Prix de Sculpture obtenu pour son Neptune, oeuvre monumentale réalisée en fer. Mais il rejette tout système qui serait un frein à l'indépendance de son œuvre.

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  • Les années Cinquante : temps expérimental et initiatique

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Auprès de son père helléniste, il découvre la Grèce, se passionne pour la Préhistoire et l'archéologie, et plus tard il fréquente le Musée de l'Homme, où il puisera ses sources d'inspiration, notamment avec les vénus callipyges paléolithiques qui le marqueront profondément.
 
En 1954, l'acquisition d'un atelier rue Raymond Losserand qu'il gardera jusqu'en 1998, lui donne l'opportunité de travailler en toute liberté. Mais, les réalités de la vie se rappellent à lui. Il vient de se marier et pour vivre et fait des petits objets qu'il vend à la Galerie du Siècle, boulevard Saint-Germain. Depuis un an, il fréquente l'atelier de Germaine Richier, dont il gagne la confiance et réalise des socles originaux pour ses sculptures. Il y rencontre Kijno, Claude Mary, Robert Müller.
 
Son évolution plastique s'amorce. Les formes étirées sont inspirées par les idoles des Cyclades. La pauvreté des matériaux récupérés chez des ferrailleurs oriente un langage dans lequel la narration fait partie de son processus de création qui se singularise très vite de celui de ses contemporains. La rétrospective de Julio Gonzalez en 1952 au musée d'art moderne de Paris lui a fait découvrir le découpage direct et l'assemblage de la tôle par la soudure autogène. La technique du « Sphyrélaton », pratiquée par les sculpteurs grecs de l'époque archaïque qui repoussaient et soudaient le métal (l'Aurige de Delphes), est adoptée par Hiquily.
 
Avec ses premiers mobiles, le mouvement devient constitutif de sa sculpture en laissant libre cours à son inventivité naturelle : Fontaine mobile (1954) s'inspire d'une structure mobile et sonore de bambou destinée à effrayer les oiseaux dans les rizières au Laos où il se trouvait en 1945. Automate (1955), Danseur de corde (1955) utilisent un mécanisme pour impulser le mouvement dont il développera plus tard la sophistication. La recherche d'équilibre trouve son point d'aboutissement avec L'Homme à la Bicyclette (1955), acheté l'année suivante par le Musée national d'Art moderne (1955). Il rencontre Calder Aux Deux Magots dont il admire les œuvres mobiles.
 
Hiquily développe la légèreté des formes : Palmiphère (1955), les structures aériennes et le sentiment d'apesanteur avec les funambules : Noctambule (1955). L'introduction de moteurs dote sa sculpture d'une autonomie toute nouvelle. Juke Box (1955) lui a été inspiré par Déserts de Varèse, dont il entend la retransmission de la première audition à Paris. Ses sculptures dans l'espace qui bougent et trouvent toutes seules leur équilibre, cohabitent avec des figures hiératiques inspirées de l'art africain : African Queen (1953) présentée à la galerie Palmes lors de sa première exposition particulière à Paris en 1955.
 
Au hiératisme cycladique répond le schématisme symbolique de la Vénus de Lespugue découverte lors de ses visites au Musée de l'Homme. Cette œuvre millénaire contient en germe les créatures hiquilyennes. Une tête minuscule surmontant d'énormes seins comme des obus, des fesses proéminentes dont il « cherche les volumes en dehors de toute anecdote ». Alain Bosquet, signataire du texte qui accompagne sa deuxième exposition particulière galerie du Dragon, parle d'objets-mères. Des déesses-mères, des déesses de la fécondité : Accouchement (1957) auxquelles répondent les icônes féminines aux symboles sexuels emblématiques. Leurs formes en mutation, dotées d'appendices aux fonctions énigmatiques, renvoient au règne de l'insecte. Elles préfigurent sa gent féminine à l'ambiguïté séductrice et castratrice. Ses figures anthropomorphes juchées sur des échasses, surmontées d'une tête lilliputienne, incarnent une beauté  « provocante ».
Une recherche formelle de plus en plus schématisée amorce une évolution. Forme et fonction cohabitent dans les pièces de moteurs, les engrenages, les rouages qui feront partie intégrante d'une majorité de ses sculptures. Hiquily reprend le principe d'intégration d'un objet trouvé inauguré avec La Pelle (1954). Avec Juke Box (1955), les Fontaines mobiles, il poursuit son aventure créatrice dans une totale indépendance face aux courants artistiques du moment ; Fougasserie architecturale I  et Fougasserie architecturale II (1959) restant isolés dans une tentation abstraite, avant l'émergence d'un style. Dans sa volonté de réconcilier l'art et la vie, il se rapproche des ready-made de Marcel Duchamp par l'emploi d'objets manufacturés de l'art traditionnel du métal : L'Homme qui marche (1958) est actionné par un système de contrepoids dispensé par un tourne broche du 18e siècle. Il préfigure une longue liste de sculptures mobiles monumentales réalisées par Hiquily, en fer et tôle récupérée, rouillée, puis patinée à l'acide phosphorique.
 
L'amorce du monumental se fait avec sa Girouette de 12 mètres en acier et roulements installée à Marbella en 1963. Hiquily sera sollicité par des architectes urbanistes dans le cadre du « 1% » réservé aux œuvres artistiques lors de chantiers publics : établissements scolaires à Mont-de-Marsan (1966), Saliès (1968), l'IUT de Bordeaux (1972), le lycée Saint-Marc de Brest (1973), le Groupe scolaire Tournebonneau à Reims (1975), le CES Paul Cézanne à Mantes-la-Jolie (1975), le CES à Sucy-en-Brie, le stade Colonel Fabien à Vitry-sur-Seine.

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  • Les années Soixante : Le style hiquilyen, le temps de la provocation

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La sculpture d'Hiquily s'identifie progressivement à ce qu'Alain Jouffroy appellera « la réalité érotique ». La Motocyclette exposée au Salon de mai de 1964, achetée quatre ans plus tard par le musée d'Art moderne de Paris en est une image emblématique. Erigée en divinité inatteignable, rigide, glacée, belle et inquiétante, perçue comme désirante et désirée, la femme est passée du statut de mater mythique à celui de mante religieuse, de la fonction matricielle à la séduction dévoreuse. Le caractère sexué de ses êtres aux mandibules d'insectes simulant des actions érotico maniaques ramènent au mythe d'Eros. Le Copulateur, forgé en 1959, anticipe sur les séries des Zoomorphes qui rencontrent un énorme succès à l'exposition de New York, à la galerie The Contemporaries où toutes les œuvres seront vendues le soir du vernissage dont Jeu de H au Guggenheim museum. Cet intermède outre-Atlantique sera suivi d'un second en 1961 en compagnie de Jean-Jacques Lebel et Alain Jouffroy. Un an auparavant les trois amis ont créé un spectacle « L'Anti-procès » avec André Pieyre de Mandiargues, Marie-Laure de Noailles et Hundertwasseur, Kudo, Tinguely, en réaction au surréalisme. Hiquily expérimente sa Machine à peindre, inventée à New York, en réponse à « l'action painting ».
 
Son langage s'érige en style. Eros a pris possession de l'iconographie et de la démarche hiquilyennes. Le dieu de l'Amour est aussi celui de la puissance créatrice. Il est le désir. La « réalité érotique » prend tout son sens en nous donnant « l'image la plus complète et la plus vraie de la réalité de la représentation érotique  ... L'homme est la clé, la femme est la serrure... » (Alain Jouffroy, première monographie publiée chez Fall en 1962). La serrure est explicitement citée avec Karl (1962) exposé chez Claude Bernard en 1964. En 1973, ses sculptures récentes sur le thème des accouplements sont exposées chez Hervé Odermatt. Elles sont ostensiblement sexuelles, notamment 08-15 (1973) matricule de la mitrailleuse allemande pendant la guerre de 14-18, introduite dans le sexe d'une femme. La sculpture sera achetée par Michel Tronche pour le musée d'Art moderne de la Ville de Paris.
 
Au début des années soixante, une nouvelle évolution se profile avec l'utilisation d'un Kratformer qui permet de bomber la tôle, planée avec un martinet. Sa sculpture alterne formes creuses, plates ou rondes. Pour désigner son travail, Hiquily rejette le terme de stylisation, auquel il préfère celui de « simplification ». La figure tend vers un primitivisme volontaire, une abstraction délibérée. Les titres inspirés de rencontres, déclenchent l'imaginaire toujours sollicité, prêt à l'irrévérence, ils provoquent, en phase avec l'agressivité des formes.


« Si l'art ne provoque pas, je ne vois pas où est l'art » (Hiquily)

 
Sa sculpture intervertit les rôles. « D'objet-mère » la femme devient « objet-femme » dont il multiplie les interprétations : La Vénus de Shanghaï (1964), La femme au foyer (1965), Face à main (1965), La Secrétaire 1966) qui porte fièrement sur ses genoux une machine à écrire Remington, symbole de la modernité.
A partir de 1964, Hiquily recourt régulièrement aux objets du quotidien : L'Horloge (ou La femme) (1962), forme féminine soudée à un cadran sans aiguille. D'ordre esthétique et métaphorique, l'accouplement de l'objet et de la figure associe des matériaux inédits. Il est celui de l'imaginaire et du réel, de l'art et du non art. Les sculptures d'Hiquily sont dictées par une inventivité toujours subversive. Les postures crues sont désormais au centre de la dialectique hiquilyenne. Pour Jean-jacques lebel, « l'exhibition vise à devenir la métaphore de la société de consommation ». 
 
En 1966, Hiquily substitue le laiton à la tôle de fer en raison des difficultés qu'il rencontre pour s'en approvisionner. Plus souple, le laiton poli se prête à une patine couleur miel. L'artiste expérimente un nouveau corps à corps avec le métal pour un univers féminin lisse, poli, déstabilisé par le décalage entre les formes inventées de l'art et les objets utilitaires. L'art devient un médium. C'est dans exploration d'une pluralité formelle dans la pratique expérimentale de la sculpture qu'Hiquily aborde le mobilier. En 1964, la commande d'un guéridon pour Marie-Laure de Noailles déclenche les commandes de meubles d'Henry Samuel. Il travaille pour de célèbres collectionneurs, Philippe de Rothshild, Teddy Van Zuylen, Louise de Vilmorin, Jacqueline Delubac. En 2005, Yves Gastou réalise une grande exposition accompagnée d'un catalogue préfacée par Pierre Cabane, dans laquelle il présente ses éditions des meubles d'Hiquily des années 1960 et 1970.

Nous ne savons pas regarder la réalité nous dit Hiquily. Eros est rattrapé par Thanatos qui s'invite dans l'œuvre de l'artiste qui nous interpelle sur la violence de la guerre avec La Compañera (réalisée pendant son séjour à Cuba lors du Salon de Mai en 1967), et sur les rapports de force entre l'homme et la femme, objet de désir et de plaisir lié au jeu de l'amour et de la mort avec La Distributrice de cigares (1967), et sa variante Carmen en 1985.
 
Avec Elle fait tourner la tête à M. Elias Howe Junior, l'aiguille phallique simule le sexe pour un acte mécanique, plus démonstratif encore avec Le Coït (1971), repris en 1990 avec Tac –Tac Bon . Cette sur-sexualisation traverse tout l'œuvre d'Hiquily et dénonce le conformisme par « une ironie constante sur le faire » (Alain Jouffroy). L'humour corrosif en est le complément. La propension d'Hiquily à l'autodérision est permanente : l'Autoportrait de 1972 (parodie du Penseur de Rodin) et le Siège érotique (1975) où l'objet abolit les frontières avec l'art.
 
En 1976, une première rétrospective de son œuvre a lieu à la Maison de la Culture d'Amiens. Quarante sculptures réalisées entre 1954 et 1976 sont exposées. Y figurent des sculptures en laiton auxquelles Hiquily associe une photographie ou une photogravure, un récent procédé de reproduction qu'il retravaille à l'acide : Meei-Meei (1973) portrait de son épouse Yen.

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  • La maturité

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A la fin des années soixante-dix, le mouvement retient à nouveau toute son attention. Fasciné par l'œuvre de Calder, il la prolonge par la reprise d'éléments de balancement faisant la synthèse entre l'intuition de la durée et du mouvement selon Bergson et la pensée appelée imaginative par Baudelaire. La Fontaine mobile I de 1978 et Fontaine mobile II de 1979 reprennent celle qu'il a réalisée en 1954. Il décline ces compositions d'équilibre avec La chute et Watergame (1982), jeux aquatiques dont les effets de surprise le rapprochent des machines de Tinguely. Celui qui enfant était animé par la passion des moteurs et démontait les horloges, renoue avec le mécanisme comme enjeu d'une liberté jubilatoire, dissimulant une beauté mise à jour par les principes de la physique mécanique. En 1980, il participe aux expositions « Energie et mouvement » à la Maison de la Culture de Reims et en 1982 « Machines...machines » au Centre Culturel de Brétigny. Son inventivité créatrice se renouvelle avec la reprise d'éléments mécaniques, comme les billes : Bill Trappe (1980). Il fait preuve d'une précision et d'une exactitude dans les mouvements qu'il va pousser à l'extrême dans des compositions abstraites telles que Swinging Sex (1983), Pneumotomate (1983), et Sinusoïde Lady (1984).
C'est aussi l'époque où Hiquily redonne un sens social à la sculpture, intégrée dans la vie urbaine par le recours à la commande publique. Entre 1981 et 1982, il réalise à la demande de la Ville de Vitry-sur-Seine, une Marathonienne, haute de 6 mètres, qui sera récemment éditée en tailles différentes.

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Hiquily est d'abord un artiste. Nullement théoricien, il revendique le plaisir, l'enchantement qu'il entend nous faire partager en nous sollicitant pour actionner l'oeuvre. Cette dimension bouleverse notre relation à la sculpture traditionnelle. Nous la touchons, caressant la sculpture au centre d'une démarche interventionniste avec l'introduction du jeu de bascule : La Funambuleuse (1981), première d'une série ; Pasiphae (1985) sur une balancelle annonce Rocking Chair (1989). Les figures féminines se lancent dans les « pirouettes » (1985-1990) et les « galipettes », avec lesquelles Hiquily revient à de grands formats : La Grande Galipette (1988), rejoignent les « funambules » du cirque (1987-2000), parvenus au point d'équilibre absolu dans les années quatre-vingt-dix : Claudinette (1999), La Sauteuse (2002).
 
La rencontre d'Hiquily avec le marchand Patrice Trigano débouche sur une  série d'éditions en bronze. Une quarantaine de pièces seront fondues par Régis Bocquel entre 1987 et 1995. Aguicheuses, elles se parent de robes patinées couleur bleu turquoise, brune ou noire, parfaitement lisses dont le poli n'en cache pas moins le mystère. Des figures de plus petites dimensions, aux formes hiquilyennes surmontées d'une tête minuscule aux membres graciles comme des aiguilles : Célestine (1987), Mimi Patte en L'air (1988).
Hiquily renoue avec « l'objet-sculpture » : une boîte à bijoux pour La croqueuse de diamants (1986), une fontaine pour Dame Pipi (1987), un coffre-fort pour La Banquière (1988).
La décennie quatre-vingt est celle où se multiplient les sculptures de petites et moyennes dimensions. Etirées en hauteur : La Môme au masque (1986), installées sur des socles tiges avec la série des « Rêveuses » : Han  Han (1987) ou fixées sur un axe vertical : Chrysalide (1987). Une deuxième série d'éditions de bronze avec Patrice Trigano clôture cette décennie.

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  • Ultime période : Accomplissement et plénitude

 

Philippe Hiquily poursuit son exploration formelle autour des thèmes du couple, et des relations hommes-femmes dont il tente d'apaiser la violence, encore décelable avec La Fente (1990) qui renvoie à L'Empalée de 1966, et Le Viol de 1991 bas-relief en polystyrène. Les tensions se modèrent avec L'Ambigüe  (1990) être bisexué qui réunit les deux faces d'un même visage et opère le passage. L'humour est toujours actif dans des relations moins conflictuelles : Tac –Tac Bon (1990), La Gifle (1991) une dispute incongrue. Quant à la femme, de coquine ingénue, pudique, elle s'émancipe impudique : Sylvia (1993), provocante Nini la motarde (1993) juchée sur une vieille moto Terrot de 1925. Il entreprend en 1991 une série de danseuses, meneuses de revue, évocatrices de grands noms : Joséphine (Baker) 1991, Zizi (Jeanmaire) 1992, Lisette (Malidor) 1992... en bascule sur un fil d'équilibriste, exceptée Lova (Moor) 1993. Libérée, tentatrice et séductrice, la femme affiche sa nudité pour un voyeurisme partagé.
 
En 1995, la rétrospective au couvent des Cordeliers de Châteauroux apporte au sculpteur une reconnaissance nationale auprès du grand public. 
C'est l'époque du retour de l'intégration d'un objet pensé comme élément formel, donnant l'orientation à la composition de la sculpture : grelot chinois et pied de cordonnier pour La Cantonnaise (1995), roues et mouvement giratoire réveillant ses amours helléniques pour L'Aurige (1997). La rotation se complique d'un dédoublement du mouvement ce qui a pour conséquence une fascination accrue pour la sculpture : L'Equilibriste au cerceau (1999).
 
En 2000, Hiquily revient au fer martelé, une technique qui définit toute son œuvre dans les années soixante. Il délaisse le laiton patiné et ses petites figures féminines et leurs cabrioles au profit de la femme mythique : Walkyrie (2000), La Vénus du Karawari (2000), Parabella (2008). Il porte un intérêt tout particulier à la figure tandis que le corps debout, les pieds joints, suit un axe vertical : Renaissance de Vénus (2000). Une verticalité qui ramène à la frontalité et au monumental : La Sévillane. Il développe les volumes à partir d'éléments plats inspirés de sa sculpture monumentale de Vitry. Vers le milieu des années 2000, il travaille à partir de maquettes en carton : Lolita Square (2005), L'Epicurienne (2010) ou en fer Girouette Marbella-Shangai, laquelle est réinterprétée en 12 mètres de haut et installée dans le parc Jing'an à Shanghai, dans le cadre de l'Exposition Universelle de 2010 à laquelle Philippe Hiquily est invité à participer.
 
Dans l'improbable et magique équilibre des contraires, Philippe Hiquily allie contrôle et improvisation, spéculation et rêve, rigueur et humour. Le mécanisme demeure l'enjeu d'une liberté jubilatoire, et d'un imaginaire qui réactive les errances du mouvement dans une volonté d'inscrire sa sculpture dans le temps.
Entre une stylisation éloquente et un symbolisme équivoque, ses déesses modernes transfigurées en objet de désir nous piègent dans leur jeu faussement innocent. L'ambivalence du mythe d'Eros sous-tend un érotisme agressif, pervers, tendre pour désamorcer l'hypocrisie d'une morale castratrice. Hiquliy a créé une image tutélaire de la femme, double, énigmatique et universelle. Elle identifie son parcours unitaire, sans rupture pour une œuvre emblématique qui place Hiquily parmi les grands créateurs de la seconde moitié du XXe siècle.

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Lydia Harambourg
Historienne de l'Art Critique d'art
Membre correspondant de l'Institut, Académie des Beaux-Art

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